Zapatistes, Chronique d'une rébellion (1/4) : Ya Basta

jeudi 4 mars 2010

Le 1er janvier 1994 alors que le présdident mexicain Carlos Salinas de Gortari célèbre l'entrée en vigueur de l'Accord de Libre-Echange Nord-Americain (ALENA), une guerilla jusqu'à lors inconnue descend des montagnes du Chiapas et réussi à occuper la ville de San cristobal de Las Casas. Cette guerilla, formée de paysans indiens qui ont décidé de faire entendre leur voix , prend le nom d'EZLN (Ejercito Zapatisata de Liberación Nacional ou armée zapatiste de liberation nationale) en hommage au révolutionnaire mexicain Emiliano Zapata. Ils revendiquent le droit à la terre, au logement, à la santé, à l'éducation, au travail et à la justice mais aussi la reconnaissance de leur identité et de leur culture en tant que peuple indigène. Rappelons que le Chipas, qui compte près d' un millions d'indiens (soit un tier des habitants contre 10% sur l'ensemble de la population mexicaine) est l'état le plus pauvre du Mexique (plus de 80% des communautés indigènes n'ont ni eau potable, ni hopitaux, ni électricité, la moitié de la population souffre de dénutrition et environ 80% des enfants souffrent de malnutrition, le tier des enfants n'est pas scolarisé...).

Le drapeau de l'EZLN

La date choisit par les insurgés est donc symbolique : affirmer le rejet de l'impérialisme et du néoliberalisme. Les combattants, aux visages cachés par des passe-montagnes déclarent la guerre au gouvernement fédéral et à son armée et parviennent à occuper divers chefs-lieux de l'état dont San Cristobal et Occosingo. Avec la premiere déclaration de la forêt de Lancandone, l'EZLN revendique : "travail, terre, logement, alimentation, santé, éducation, indépendance, liberté, démocratie, justice et paix".

"AU PEUPLE DU MEXIQUE, FRERES MEXICAINS,

Nous sommes le produit de cinq cents ans de lutte, d’abord contre l’esclavage, durant la guerre d’Indépendance contre l’Espagne menée par les insurgés, ensuite contre les tentatives d’expansionnisme nord-américain, puis pour promulguer notre Constitution et expulser l’Empire français de notre sol, enfin contre la dictature porfiriste qui refusa une juste application des lois issues de la Réforme. Du peuple insurgé formant ses propres chefs surgirent Villa et Zapata, des pauvres comme nous, à qui on a toujours refusé la moindre formation, destinés que nous étions à servir de chair à canon, afin que les oppresseurs puissent piller impunément les richesses de notre patrie, sans qu’il leur importe le moins du monde que nous mourions de faim et de maladies curables ; sans qu’il leur importe que nous n’ayons rien, absolument rien, ni un toit digne de ce nom, ni terre, ni travail, ni soins, ni ressources alimentaires, ni instruction, n’ayant aucun droit à élire librement et démocratiquement nos propres autorités, sans indépendance aucune vis-à-vis de l’étranger, sans paix ni justice pour nous et nos enfants.

Mais nous, AUJOURD’HUI, NOUS DISONS : BASTA ! Nous, les millions de dépossédés, héritiers des véritables fondateurs de notre nationalité, nous appelons tous nos frères à suivre cet appel, seule possibilité pour ne pas mourir de faim devant l’ambition insatiable d’une dictature vieille de soixante-dix ans, dirigée par une bande de traîtres qui représentent les groupes les plus conservateurs, les bradeurs de la patrie. Ce sont les mêmes que ceux qui se sont opposés à Hidalgo et à Morelos, qui ont trahi Vicente Guerrero, les mêmes qui ont vendu plus de la moitié de notre sol à l’envahisseur étranger, qui ont amené un prince européen pour nous gouverner, les mêmes encore qui ont formé la dictature des scientifiques porfïristes, qui se sont opposés à l’expropriation des compagnies pétrolières, qui ont massacré les cheminots en 1958 et les étudiants en 1968, les mêmes enfin qui, aujourd’hui, nous prennent tout, absolument tout"

Extrait de La première déclaration de la forêt de Lacandone, 1er Janvier 1994

Combattant(e)s zapatistes

La réponse du gouvernement est immédiate et aprés 12 jours de combats qui firent entre 145 et 46 morts selon les sources, le président ordonne un cessez-le-feu unilateral et entame un premier dialogue avec l'EZLN dans la cathédrale de San Cristóbal de Las Casas. L'évêque de San Cristóbal, Samuel Ruiz García, sert de médiateur. Pour prouver sa bonne volonté, le gouvernement libère les prisonniers zapatistes et l'EZLN livre son unique otage, le Général Absalón Dominguez, ancien gouverneur du Chiapas. Mais le gouvernement fédéral ne peut pas dialoguer plus en profondeur avec un mouvement rebelle. Pour obliger le gouvernement à les prendre au sérieux, les zapatistes rompent l'encerclement imposé par l'armée fédérale et prennent sans recourir à la violence plusieurs chefs-lieux municipaux , qu’ils transforment en municipalités autonomes et rebelles. S'en suivent deux ans de dialogue jusqu'en février 1996 et les accords de San Andrès...

[A suivre...]

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